Le 26 novembre 2021, le Parlement portugais a adopté une nouvelle loi permettant aux femmes n'ayant définitivement plus la possibilité physique d'enfanter de recourir à la gestation pour autrui (GPA).
Cette loi ne constitue pas la première tentative du législateur portugais d'autoriser la pratique des mères porteuses. Le 22 août 2016, la loi sur la procréation médicalement assistée était modifiée afin d'y introduire une réglementation sur la gestation pour autrui.
Toutefois, le Tribunal constitutionnel portugais avait ensuite jugé à deux reprises (en avril 2018 et en septembre 2019 voy. IEB – La loi portugaise jugée inconditionnelle) que certains éléments de cette loi étaient inconstitutionnels, ses effets étant alors suspendus. L'inconstitutionnalité mise en évidence par la Cour portait sur le fait que la loi ne permettait à aucun moment à la mère porteuse de revenir sur son consentement jusqu'à la naissance, et de décider de garder l'enfant qu'elle portait. Ce déséquilibre était, selon la Cour, contraire au droit au développement de la personnalité de la femme enceinte, compris en accord avec le principe de la dignité humaine et le droit de fonder une famille.
La nouvelle loi, publiée le 16 décembre 2021 et entrée en vigueur le 1er janvier 2022, vise précisément à remédier à cet élément en introduisant la possibilité pour la mère porteuse de révoquer son consentement jusqu'à l'enregistrement de l'enfant né vivant et viable au registre de la population, cet enregistrement prenant place au vingtième jour suivant la naissance.
Plus largement, la loi introduit un régime juridique visant à encadrer les contrats de gestation pour autrui. Le Portugal rejoint donc la Grèce dans la liste des pays européens autorisant explicitement la gestation pour autrui pour raison médicale.
Conditions d'accès
Outre la nécessité d'une « situation clinique empêchant de manière absolue et définitive la grossesse de la femme » (telle que l'absence d'utérus), plusieurs conditions complémentaires sont prévues dans la loi. Celles-ci visent ainsi non seulement à éviter la pratique de GPA de convenance, mais aussi que le Portugal devienne un lieu de tourisme de gestation.
La GPA ne sera donc accessible qu'aux ressortissants portugais, ainsi qu'aux personnes possédant une résidence permanente au Portugal, ce qui n'était pas expressément prévu par l'ancienne loi.
Quelles sont donc les personnes auxquelles la loi portugaise ouvre désormais l'accès à la GPA ?
En l'absence de liste explicite, plusieurs éléments nous renseignent à ce propos.
Premièrement, la présence d'une femme est nécessaire, dès lors que la GPA n'est autorisée que pour les femmes dans l'impossibilité d'enfanter.
Deuxièmement, le fait que la loi fasse systématiquement référence « aux bénéficiaires » pourrait laisser entendre que le contrat de GPA est destiné au couple et non aux personnes célibataires.
Enfin, l'enfant doit être conçu avec les gamètes d'au moins un des membres du couple commanditaire.
Filiation
La nouveauté de la loi portugaise tient aussi, voire surtout, aux règles prévues s'agissant de la filiation de l'enfant issu d'une mère porteuse.
Dans la majorité des pays européens, en l'absence de cadre juridique particulier applicable à la filiation issue d'une GPA (celle-ci étant considérée comme non éthique en soi), est actuellement appliqué le régime de droit commun. La filiation se fait donc dans le respect de l'adage « mater semper certa est » revenant à considérer que la mère légale d'un enfant sera toujours la femme qui a accouché, indépendamment de la question de l'existence d'un lien génétique entre la mère et l'enfant.
Le législateur portugais souhaite ici éviter la reconnaissance de tout lien de filiation entre la mère porteuse et l'enfant qu'elle mettra au monde. Deux dispositions sont prévues en ce sens : premièrement, est formellement interdit la conception de l'enfant avec les ovocytes de la mère porteuse ; deuxièmement, seront considérés parents légaux de l'enfant à naître les membres du couple commanditaire et non la mère porteuse.
Enfin, la loi interdit toute rémunération de la mère porteuse, à l'exception des dépenses liées à la surveillance de la santé de la mère porteuse et au bon déroulement de sa grossesse.