Elle a été portée dès le début des années '80 par les premiers triomphes de la biologie moléculaire, attendue comme la solution nette et définitive par tous deux qui devaient leur pathologie à une mutation unique, par tous ceux dont le cancer semblait devoir son existence au dérapage d'un proto- ou d'un anti-oncogène ; et par extension, par tous ceux qui pensaient qu'on allait enfin se montrer maître d'un génome hérité sans choix de ses père et mère.
Quelques essais fondateurs ont tourné court. Normal : on avait sans doute brûlé quelques étapes essentielles. Le succès devait être pour demain. Mais les lendemains successifs ont tardé à faire poindre les victoires attendues. Le temps a passé. La désillusion a grandi ; à tel point que la « thérapie génique » - puisque c'est d'elle qu'il s'agit – a été déclarée en état de mort clinique dans les toutes premières années du XXIe siècle. On avait rêvé. On y avait cru. On en avait parlé plus qu'on ne l'avait vu agir. Trop beau, trop complexe. Trop dangereux sans doute aussi. Et l'Arlésienne est repartie dans le maquis de l'illusion scientifique.
Mais la recherche progresse ; dans les mille et une directions où la curiosité la pousse. On débusque quelques mécanismes jusque-là inconnus chez des bactéries, on identifie de nouveaux terrains d'actions pour quelques enzymes ou pour d'autres protéines. Des virus se laissent manipuler, conduire, vider des gènes qui les rendent agressifs. On détourne des cellules de leur fonction première, on éteint ou amplifie l'expression de gènes ciblés.
Et puis quelques esprits opportunistes tentent des rapprochements, mettent en relation des réalités disparates. Des processus sont élaborés dans la visée d'objectifs novateurs ; ou bien dans celle d'objectifs anciens, presque oubliés. Et la thérapie génique reprend corps, comme la créature du besogneux Frankenstein, la prudence en plus. Vingt-cinq, trente ans plus tard, le vieux rêve de la thérapie génique reparaît, avec tout le poids d'une expérience acquise. Et tout semble redevenir possible. Autrement, mais plus efficacement sans doute aussi. En 2014, une souris adulte est guérie d'une maladie héréditaire, la tyrosinémie de type I1,2. Après une seule injection. 1% des cellules dont le génome est modifié suffisent à établir le succès et à déclarer le traitement efficace ; un mois plus tard, la proportion des cellules concernées est passée à 30% et la souris est déclarée guérie. Définitivement.
La souris n'est pas l'homme et une pathologie n'est pas l'autre ; mais le succès est incontestable. Et l'avenir est en marche.
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