Une étude parue dans la revue BMJ Supportive & Palliative Care en mai 2024 s’est intéressée à l’impact de l’euthanasie sur les soins palliatifs dans l’État de Victoria où cette pratique est dépénalisée depuis 2017. L’étude a été menée à travers trois centres de soins, entre 2019 et 2021 et a analysé les données de 141 patients ayant exprimé le souhait de mourir par euthanasie (ce qui a été le cas pour 51 d’entre eux).
Cette étude met en lumière de nouveaux défis avec l’apparition de l’euthanasie qui, opérant en parallèle des soins médicaux et palliatifs, tend à remettre en question l’approche des soins de fin de vie.
Les soins palliatifs dans le contexte de l’euthanasie : quel impact ?
Les soins palliatifs visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, psychologique, existentielle ou spirituelle, à sauvegarder la dignité de la personne malade jusqu’à sa mort naturelle et à soutenir son entourage. L’étude a analysé en premier lieu l’impact des demandes d’euthanasie sur la prise en charge globale des patients et a remarqué que les demandes de renseignements sur l’euthanasie pouvaient parfois détourner les patients et les soignants des discussions habituelles sur la façon d’améliorer la qualité de vie. Or, lorsque les motivations du patient pour l’euthanasie ont été écoutées et analysées, les patients étaient plus ouverts à l'idée d'envisager des options thérapeutiques.
L’étude a également analysé l’impact de l’euthanasie sur les relations familiales, remarquant que les demandes d’euthanasie pouvaient susciter des conflits et un stress important pour les familles et le personnel soignant. Par ailleurs, certains patients ont exprimé la crainte d'être abandonnés par les professionnels de santé ou les membres de leur famille dans le cas d’une demande d’euthanasie.
L’étude relève aussi une possible détresse morale chez les soignants qui font face à des refus de soins palliatifs et à des demandes d’euthanasie entrainant une ambiguïté problématique entre ces deux pratiques.
Les soins palliatifs efficaces pour répondre à la souffrance réelle
L’étude conclut par une réflexion nuancée concernant l’impact de l’euthanasie sur la qualité des soins palliatifs, remarquant notamment que les demandes d’euthanasie pouvaient inviter à mieux écouter et comprendre la souffrance des patients. L’étude relève aussi que, parmi les personnes qui sont décédées des suites d'une euthanasie, la crainte de souffrances futures (49%) a été mentionné plus souvent que la souffrance actuelle (45.1%). Au contraire, parmi celles qui ne sont finalement pas décédées par euthanasie, la principale raison de la demande d’euthanasie au départ, était la souffrance réelle (66,7 %) plus que l'autonomie (65,3 %). Les personnes qui sont effectivement décédées par euthanasie souffraient davantage de problème de santé mentale alimentant une peur de souffrir.
L’étude souligne ainsi que lorsque les patients souffrent d’une souffrance réelle, les soins palliatifs ont un impact positif sur cette souffrance et permettent de réduire les demandes d’euthanasie. Il reste à savoir dans quelle mesure il sera possible à l’avenir, de continuer à fournir des soins palliatifs de qualité dans un contexte où la généralisation de l’euthanasie conduit la société à l’envisager comme la seule solution pour mettre fin à la souffrance.