Un médecin du Centre Hospitalier de Huy (CHRH) est accusé d'avoir tué 4 de ses patients en septembre 2018 dans l'unité de gériatrie de l'institution. Ces patients ont été mis sous sédation palliative et sont décédés le même week-end. Selon le CHRH, l'équipe médicale en a été bouleversée et a dû bénéficier d'un accompagnement psychologique. Estimant que le médecin n'avait pas respecté les règles de procédure interne et que les faits étaient trop graves, l'hôpital l'a licencié dans les jours qui suivaient et a transmis le dossier au Parquet. Une instruction par le Procureur du Roi est en cours. Le docteur est poursuivi pour assassinats, alors qu'il se défend d'avoir voulu provoquer la mort de ses patients.
La question qui se pose à la justice est la suivante : ces sédations sont-elles en réalité des euthanasies déguisées, voire des assassinats si les patients n'avaient pas exprimé leur volonté de mourir ? Pour Maître Toller, avocat du médecin, son client est resté « dans le cadre des soins palliatifs, prévus par la loi, afin de rendre plus confortables les derniers moments de vie en attendant que le décès survienne de lui-même naturellement ».
Précisons que l'intention de ne pas provoquer la mort ne suffit pas pour qualifier l'acte : il faut encore évaluer son processus et son résultat. (Voir à ce propos le dossier de l'IEB sur la sédation palliative)
Lorsqu'un médecin envisage une sédation palliative, son intention doit être de soulager les souffrances réfractaires à tout autre traitement en diminuant la conscience du patient. L'intention n'est donc pas de provoquer la mort, comme c'est le cas pour une euthanasie. Le processus est lui aussi différent : pour une sédation, le médecin diminue le niveau de conscience d'un patient en fin de vie en utilisant une dose minimale efficace de sédatifs, c'est-à-dire proportionnée aux symptômes réfractaires, et régulièrement ajustée avec surveillance continue. Pour l'euthanasie au contraire, il opère un surdosage volontaire (généralement du curarisants ou barbituriques) pour garantir une mort rapide. Un surdosage de sédatifs ou de morphine peut aussi provoquer la mort. Le résultat, enfin, n'est pas le même : l'euthanasie entraîne la mort, tandis que la sédation, si elle est correctement appliquée (sans surdosage, et en toute fin de vie), ne hâte pas le moment de la mort mais laisse le patient mourir naturellement de sa maladie.D'aucuns se sont saisis de l'affaire en cause pour insister sur la nécessité de créer un cadre légal pour la sédation palliative avec un système d'enregistrement et de contrôle. (Prof. Distelmans, hln.be 23/09/19) Pourtant, n'est-ce pas plutôt une meilleure formation des médecins aux soins palliatifs qui permettra de s'assurer de la bonne pratique de la sédation palliative ? Rappelons que le système d'enregistrement et de contrôle des euthanasies n'empêche pas qu'un bon nombre de médecins continue à ne pas déclarer les euthanasies qu'ils pratiquent...
Pour en savoir plus sur la sédation palliative, ses aspects médicaux et éthiques : voir le NOUVEAU DOSSIER de l'IEB « La sédation palliative : une analyse éthique pour dissiper la confusion »