Malaise chez les médecins par rapport à l’euthanasie pour souffrance psychique

Auteur / Source : Publié le : Thématique : Fin de vie / Euthanasie et suicide assisté Actualités Temps de lecture : 2 min.

 Imprimer

Une enquête réalisée par MediQuality, une communauté médicale digitale pour le Benelux, a sondé les médecins pour savoir ce qu'ils pensaient de l'euthanasie en cas de souffrances psychiques et de démence. Sans doute encore secoués par l'affaire Tine Nys, une nette majorité d'entre eux (78%) estime qu'il faut évaluer et/ou adapter la loi sur l'euthanasie en ce qui concerne la souffrance psychique insupportable.

Ce sont 737 médecins qui ont librement répondu aux « questions éthiques en milieu médical » adressées par la plateforme à ses membres. L'enquête est donc sans prétention scientifique, même si elle donne à réfléchir.

Pour 4 médecins sur 10, l'euthanasie ne devrait pas être autorisée pour des cas de souffrance psychique insupportable (alors qu'elle est aujourd'hui légale), soit parce qu'ils considèrent que ces souffrances ne sont pas irréversibles et qu'il faut chercher des solutions alternatives, soit parce qu'il n'y a pas, selon eux, de critères objectifs pour démontrer le caractère insupportable d'une souffrance psychique. Ce n'est pas tout : parmi les médecins en faveur de l'euthanasie pour souffrance psychique insupportable, la moitié pense que la loi actuelle n'est pas suffisante car elle « manque de clarté, de précision voire d'adaptations ».

A la question de savoir si l'euthanasie doit être étendue aux cas de démence, le clivage est plus sensible : 45% répondent par la négative, contre 55% en faveur. On peut regretter de ne pas voir apparaître, parmi les explications possibles de la réponse, une réflexion sur le consentement de la personne démente à une euthanasie dont elle n'aurait plus conscience.

L ‘enquête aborde aussi l'extension de l'euthanasie en cas de « vie accomplie » (aussi appelée "fatigue de vivre"), laissant voir une majorité de médecins (63%) opposés à un tel élargissement en raison du caractère bien trop subjectif et imprécis de la notion. L'irréversibilité du geste euthanasique leur paraît sans commune mesure avec le sentiment de « vie accomplie ». 37% se disent en faveur de ce changement, mais « au cas par cas ».. autrement dit, sans que la loi ne s'en mêle de trop.

Une autre question fort discutée ces dernières années en Belgique est celle de l'encadrement (par protocole ou cadre juridique) de la sédation palliative. Une majorité des médecins interrogés estiment que cela n'est pas nécessaire, beaucoup d'entre eux considérant que la sédation est un acte médical qui se pratique de façon « naturelle ». 43% jugent cet encadrement nécessaire pour éviter des euthanasiées déguisées et protéger les médecins contre d'éventuelles poursuites.

A l'heure où d'autres pays dans le monde s'inspirent des législations belge et néerlandaise pour ouvrir la porte à l'euthanasie, il ne faudrait pas oublier qu'une grande partie des praticiens du Benelux exprime des doutes voire un malaise par rapport à ces lois.  Quant à étendre l'euthanasie aux personnes démentes et aux personnes "fatiguées de vivre", il semble pour le moins imprudent d'emprunter cette direction si déjà l'euthanasie pour souffrance psychique est loin de faire l'unanimité. 

 

Pour aller plus loin :

Dossier : Euthanasie pour souffrance psychique – synthèse de l'Avis du Comité consultatif de bioéthique

Dossier : Fatigue de vivre et euthanasie – où en est la réflexion en Belgique ?

Flash Expert : L'euthanasie pour les personnes démentes – éléments de réflexion

Dossier : La sédation palliative – analyse éthique pour dissiper la confusion