Le débat relatif à l’autorisation de l’euthanasie et du suicide assisté est relancé en France, à travers l’avis rendu par le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) ce 13 septembre.
Attendu depuis plusieurs mois, cet avis indique en substance « qu’il existe une voie pour une application éthique de l’aide active à mourir », pour autant que soient remplies « certaines conditions strictes ».
Par "aide active à mourir", le Comité vise aussi bien le suicide assisté que l’euthanasie, en tant qu’acte visant à mettre fin à la vie d’autrui, à sa demande, du fait de son état de santé.
Dans ses avis rendus précédemment sur le sujet, le Comité s’était jusqu’alors refusé à reconnaître le caractère éthique d’un tel acte.
L’évolution radicale de la position du CCNE intervient en dépit d’une absence de consensus parmi ces membres : fait rare, huit d’entre eux expriment en effet une « réserve » fondamentale à l’avis majoritaire, dans une opinion dissidente mentionnée en annexe.
Euthanasie et soins palliatifs
Aux yeux du CCNE, l’enjeu consiste, aux yeux du CCNE, à concilier deux principes fondamentaux : d’une part, « l’autonomie de la personne », d’autre part, « le devoir de solidarité envers les personnes les plus fragiles ».
Selon la majorité des membres du CCNE, il existerait un espace éthique étroit permettant l’euthanasie ou le suicide assisté en France, à condition que les multiples « mesures de santé publique recommandées dans le domaine des soins palliatifs » soient prises en compte.
Les expériences respectives de la Belgique ou d’autres pays ayant dépénalisé l’euthanasie témoignent pourtant du caractère illusoire d’un tel « filtre palliatif », dès lors que l’euthanasie est perçue – et présentée – comme la garantie ultime de ne pas souffrir en fin de vie, en dépit des solutions efficaces et véritables offertes par les soins palliatifs.
Critères d’acceptation
Si l’avis ne prétend pas être exhaustif quant aux critères d’acceptation d’une demande d’euthanasie ou de suicide assisté, celui-ci se réfère à l’hypothèse de « personnes majeures atteintes de maladies graves et incurables, provoquant des souffrances physiques ou psychiques réfractaires, dont le pronostic vital est engagé à moyen terme ». Le CCNE ne ferme toutefois pas la porte à l’euthanasie des mineurs ou des personnes qui ne sont pas en fin de vie.
Ici encore, rappelons que l’extension continue des situations couvertes par l’euthanasie (enfants, personnes incapables d’exprimer leur volonté au moment de l’injection, personnes handicapées ou souffrant de dépression, …) a pu se vérifier dans chacun des pays ayant emprunté la voie de sa dépénalisation.
Vers une véritable consultation citoyenne ?
L’avis du CCNE intervient à quelques semaines de l’ouverture d’une consultation citoyenne sur l’évolution de la législation sur la fin de vie en France. Cette consultation, dirigée par le Conseil économique, social et environnemental, est perçue par d’aucuns comme une démarche purement formelle, tenant compte de la teneur de l’avis rendu par le CCNE et des déclarations récentes du Président de la République Emmanuel Macron, laissant entendre qu’une loi autorisant l’euthanasie serait bien votée en 2023. L’absence de véritable prise en compte, par la loi de bioéthique votée en 2021, des États généraux de la bioéthique tenus en 2018, constitue un signe supplémentaire en ce sens.