Au Royaume-Uni, un homme de 34 ans souffrant de graves problèmes intestinaux depuis 10 ans a été placé dans un coma artificiel et privé d'alimentation et d'hydratation jusqu'à sa mort.
L'homme en question présentait par ailleurs des antécédents dépressifs. Pour remédier à ses problèmes intestinaux, une opération a été réalisée, consistant à lui implanter une stomie de manière provisoire. Une stomie est une déviation chirurgicale d'un conduit naturel permettant de court-circuiter le ou les organes défaillants. Les patient “stomisés” portent alors une poche leur permettant de recueillir leurs selles ou leurs urines.
Dans le cas d'espèce, les médecins se sont rendus compte de la nécessité de recourir à une stomie permanente car les jours du patient étaient en danger. Or, ce dernier avait émis une déclaration anticipée refusant ce type de traitement. Dans cette déclaration, communiquée par écrit à sa famille proche, le patient explique qu'il « refuse les éléments de traitement qui, bien que potentiellement nécessaires pour maintenir ou prolonger la vie, auraient pour conséquence directement ou indirectement (…) la formation d'une stomie, par une iléostomie, colostomie, urostomie ou similaire, qui devrait être permanente… ».
Avec l'accord de la famille et se basant sur les déclarations préalables du patient, les médecins ont décidé de maintenir le patient dans un coma artificiel dès la fin de l'opération, de lui administrer des sédatifs et de mettre fin à son hydratation et son alimentation.
Avant de prendre cette décision, les médecins ont saisi le tribunal (la Court of Protection) afin de vérifier la légalité de la démarche. Il convient de préciser que l'euthanasie et le suicide assisté sont interdits au Royaume-Uni. De plus, le patient en question n'était pas en phase terminale. Pourtant, le tribunal a donné son aval à l'équipe médicale pour laisser le patient mourir, estimant qu'il en allait de son “meilleur intérêt”.
Refus légitime de soins ou euthanasie passive / aide au suicide ?
Face à une telle démarche, plusieurs questions éthiques peuvent être soulevées.
En premier lieu, se pose la question de savoir dans quelle mesure le patient aurait dû être sorti de son coma artificiel avant que ne soient entamées la sédation et l'arrêt de l'alimentation et de l'hydratation: une telle précaution lui aurait permis de confirmer ou d'infirmer sa décision - précaution d'autant plus nécessaire qu'il avait accepté la pose d'une stomie temporaire.
Plus fondamentalement, même à considérer que le consentement avait été valablement formulé, il convient de s'interroger sur la qualification pouvant être donnée à cet arrêt volontaire de l'alimentation et de l'hydratation (VSED en anglais, pour Voluntarily Stopping Eating and Drinking). L'arrêt de l'alimentation et de l'hydratation peut certes correspondre à un refus légitime de soins, lorsque ceux-ci sont considérés comme inutiles au seuil de la mort. D'aucuns voient toutefois dans cette procédure une alternative légale à l'euthanasie ou au suicide assisté, dans les pays n'ayant pas légalisé ces pratiques. Comme le montre une étude de chercheurs de l'Université de Lancaster, la VSED est d'ailleurs pratiquée de facto dans de nombreux pays anglo-saxons (Etats-Unis, Royaume-Uni, Australie), sans qu'un cadre légal clair ne balise celle-ci.
D'un point de vue juridique, le cas d'espèce équivaut clairement à une euthanasie par omission, dans la mesure où le patient décède de l'arrêt des soins vitaux. En outre, dans l'hypothèse de patients qui ne sont pas en phase terminale (comme c'est le cas en l'espèce), l'arrêt de l'alimentation et de l'hydratation correspond même à une aide médicale au suicide (voy. l'étude publiée en ce sens dans les Annals of Internal Medicine).
Source : National Review - Wesley J. Smith (06/06/2020), Gènéthique