Suivie depuis le début de sa grossesse au Centre Universitaire de Santé McGill (CUSM) de Montréal, une maman enceinte de 6 mois (27 semaines) a reçu le diagnostic que le bébé serait porteur de plusieurs anomalies.
Demandant à ce qu'il soit mis fin à sa grossesse (avortement tardif), la maman et son conjoint ont attendu la décision du Comité d'éthique de l'hôpital à qui il revient de se prononcer dans de tels cas où l'enfant est viable. Pour diverses raisons qui font partie du dossier médical personnel de la maman, le Comité d'éthique a conseillé de ne pas procéder à cette IMG. La maman s'est alors adressée à un autre hôpital pour obtenir un second avis dans lequel les médecins eux-mêmes ne s'entendaient pas sur l'avenir de l'enfant à naître.
Si le CUSM reconnaît le « droit strict à l'interruption volontaire de grossesse de chaque femme, conformément à la jurisprudence établie par la Cour suprême du Canada », il n'en reste pas moins qu'il a refusé de procéder à cette IMG, faisant appel à la liberté qu'a toute institution en matière de clause de conscience. Le CUSM a en effet estimé qu'effectuer une IMG au troisième trimestre sans que ni la santé de la mère ni celle du bébé ne soient en danger constitue une atteinte aux « valeurs du CUSM comme institution » ainsi qu'aux « pratiques usuelles » de la société canadienne, s'agissant d'un handicap non mortel.
Les parents ont alors fait appel à un avocat, Jean-Pierre Ménard, pour défendre leur cause. La mère estimait qu'« on voulait la forcer à avoir un enfant, qu'on ne voulait pas l'aider, que c'étaient les règles de l'hôpital, qu'elle se sentait prise au piège, que c'était son corps, sa vie ». Pourtant l'hôpital ne l'a pas contrainte à garder son enfant ; le comité lui a simplement suggéré de se faire transférer vers un autre établissement qui pouvait accéder à sa demande.
Selon certains juristes, le refus de l'hôpital ne respecte pas les décisions de la Cour suprême canadienne qui stipulent que les femmes ont le droit fondamental de choisir de mener leur grossesse à terme ou non, quel que soit le stade de développement et la viabilité du bébé. Ils affirment qu' « aucune question éthique ne se situe au-dessus du droit ». « Si le médecin a droit à l'objection de conscience, ce n'est pas le cas pour un hôpital », a soutenu l'avocat. L'avortement tardif a eu lieu dans un autre établissement.
Malgré le pluralisme démocratique cher au Canada, c'est donc la liberté d'association d'une institution hospitalière qui est ici mise à mal.
(Voir Dossier IEB)
Source : Le Devoir