Le 15 juillet dernier, le chercheur Adrian Zenz a publié dans the Jamestown Foundation un rapport intitulé « Stérilisations, stérilets et prévention des naissances forcée : la campagne du parti communiste chinois pour réduire le taux de natalité des Ouïghours dans le Xinjiang ».
Croissance démographique et régulation des naissances
Le chercheur se fonde en premier lieu sur les statistiques officielles des autorités chinoises, selon lesquelles l'accroissement naturel de la population du Xinjiang a chuté de 7,13 à 6,4 pour 1000 personnes, contre une moyenne nationale de 10,48 ‰ dans l'ensemble de la Chine (voy. tableau issu du rapport d'A. Zeng).
Une telle différence s'explique par plusieurs mesures de régulation des naissances visant spécifiquement la province du Xinjiang, et plus particulièrement ses populations musulmanes : Ouïghours, Kirghiz, Hui et Kazakhs. Les stratégies adoptées sont diverses : campagnes préventives, limitation du nombre d'enfants par foyer, contraception et avortement gratuits…
En pratique, le non-consentement des femmes est rarement un obstacle à l'application de ces mesures.
Camps d'enfermement
Le non-respect de ces mesures de réduction de la natalité (i.e., le fait d'avoir plus d'enfants que le nombre maximal autorisé, ou dans un laps de temps trop court) entraînerait de fortes sanctions (voy. tableau du Journal of Political Risk), notamment l'envoi en camps de “transformation par l'éducation”. Il en existe plus de 1000 dans la région de Xinjiang, renfermant actuellement 700 000 à 1 000 000 de personnes appartenant à ces minorités ethniques. Dans ces camps, la séparation des couples serait systématique, ce qui constituerait alors la première raison de la baisse de la fécondité.
Avortement et stérilisation forcés
De nombreux témoignages soulignent par ailleurs l'existence d'autres pratiques au moins aussi problématiques, telles que l'avortement ou la pose de stérilet forcés. Parmi ces témoignages, citons le cas de Reyhangul, interrogée par La Libre Belgique : celle-ci explique notamment avoir subi des avortements forcés (par aspiration) dès les années 2000, et avoir ensuite été contrainte à deux reprises (dont une fois à son insu) à se voir poser un stérilet (dispositif contraceptif intra-utérin).
L'étude d'A. Zenz met d'ailleurs en exergue que 80% de l'ensemble des nouveaux placements de stérilets dans le pays sont effectués au Xinjiang.
Dans un entretien accordé au journal Libération, Qelbinur Sidik Beg témoigne quant à elle avoir subi des interventions chirurgicales stérilisantes (ligature des trompes de Fallope).
Eugénisme ethnique
Outre l'avortement forcé et la contraception invasive, ce programme de régulation des naissances passerait par la généralisation de tests de grossesse systématiques et contraints, permettant de détecter les grossesses considérées comme indésirables, et d'ensuite contraindre la femme à avorter ou à être stérilisée. Cette politique tranche par ailleurs avec le fait que des mesures natalistes sont désormais mises en oeuvre dans le reste de la Chine, du fait des conséquences économiques et démographiques préoccupantes de la politique de l'enfant unique. En parallèle, le programme de régulation forcée des naissances tend visiblement à réduire l'importance démographique des minorités ethniques dans la région du Xinjiang, dans la mesure où celles-ci sont considérées comme une menace contre la société ou l'Etat chinois. En cela, ce programme s'apparente à une forme d'eugénisme ethnique, visant certaines populations spécifiques, dont les « caractéristiques » (en l'espèce, non génétiques, mais ethniques) sont jugées indésirables par les autorités (voy. plus largement sur ce point le dossier récent de l'IEB consacré à l'eugénisme).
Sources : Adrian Zenz - Jamestown Foundation ; Libération ; La Libre Belgique ; Gènéthique