En écho à l'affaire Perruche en France, qui s'était soldée d'une intervention du législateur estimant que « nul ne peut se prévaloir d'un préjudice du seul fait de sa naissance », la Cour de cassation belge vient de publier sa décision d'octobre dernier et a confirmé sa jurisprudence sur la question délicate de la vie préjudiciable. Le préjudice de l'enfant né avec un handicap n'est donc pas réparable.
A l'origine du débat se trouve un couple dont l'enfant naquit avec la maladie de Sanfilippo, affection grave et incurable. Ils avaient eu recours à un diagnostic prénatal qui ne décela pourtant aucune anomalie. Force fut de constater qu'à la naissance, le bébé était bel et bien atteint de l'affection. Les parents ont alors poursuivi en justice l'hôpital en vue d'être indemnisés pour préjudice personnel et de l'enfant lui-même. La Cour d'appel avait alors choisi de condamner l'hôpital. Celui-ci a néanmoins saisi la Cour de cassation qui a cassé l'arrêt prononcé par la Cour d'appel.
La question qui fit débat est la suivante : l'enfant né handicapé, après une erreur de diagnostic prénatal, peut-il considérer sa naissance comme un préjudice, dans la mesure où son handicap est irrémédiable ?
D'un côté, l'arrêt de la Cour d'appel a disposé que si « l'erreur de diagnostic n'a pas causé le handicap qui préexistait à cette erreur et auquel il ne pouvait remédier », « le dommage ne se serait toutefois pas réalisé » sans celle-ci. « L'enfant avait un intérêt certain et légitime à faire l'objet d'un avortement thérapeutique [autorisé et envisagé par les parents si dépistage il y avait eu] » et « le préjudice lié au handicap n'est pas effacé par le seul fait de vivre ».
De l'autre côté, la Cour de cassation a estimé qu'il n'était pas possible de déduire l'existence d'un dommage en relation causale avec la faute si ce raisonnement supposait que l'erreur de diagnostic place l'enfant dans une situation moins favorable que celle dans laquelle il se trouvait avant celle-ci. Il ne peut être question de dommage si les termes de comparaison entre les deux situations sont l'existence d'une personne née avec un handicap d'une part, et sa non-existence (sa mort) d'autre part. De plus, l'article 350 du code pénal autorisant l'interruption thérapeutique de grossesse a pour seul but d'encadrer les avortements en en fixant les conditions et non de disposer un quelconque intérêt légitime et certain de l'enfant lui-même à faire l'objet d'un avortement.
Voir Dossier de l'IEB : La naissance handicapée : un préjudice indemnisable ?
Autre jugement en ce sens 20/11/2014 : ICI
Source : Le Journal du Médecin